Les activités sur le réseau, les chantiers sur le matériel roulant, la voie, les bâtiments...
Activities of the society: workshops, track, carriages maintenance, buildings...

jeudi 31 octobre 2019

Ode aux stages vapeur

Le chemin de Fer de Rillé est connu pour les stages de formation à la conduite des locomotives à vapeur. Voici le témoignage de ce qu'a vécu un stagiaire pendant 3 jours.


Journal de bord d'un stagiaire comblé


Samedi 9 h, j’arrive en vue de la rotonde visible de la route. La tension monte un peu, le stage est annoncé physique et vu mon gabarit ce n’est pas le domaine ou j’excelle mais c’est un rêve de gosse de pouvoir conduire une locomotive à vapeur et lorsque j’ai su que c’était possible avec l’AECFM je n’y aurais renoncé pour rien au monde.
Accueil convivial avec un bon café, présentation, petite visite du site et sans tarder on rentre dans le vif du sujet. Comme nous ne sommes que 2 stagiaires la répartition des rôles est vite faite, pour ce premier jour Jean-Marc sera le mécanicien et je serai le chauffeur, chacun d’entre nous étant chaperonné par un instructeur aguerri.
Bernard m’explique le rôle du chauffeur et les premières tâches à accomplir. Muni de seaux, d’une balayette et d’une truelle j’entreprends le nettoyage du foyer et de la boîte à fumée. Pour cette fois je suis dispensé du ramonage des tubes de la chaudière.

Pas de temps mort, une fois l’ensemble dépoussiéré il faut allumer le feu et l’alimenter régulièrement avec du bois d’abord. Après deux ou trois enfumages lors de l’ouverture du foyer, je finis par saisir le fonctionnement du tirage . Pas question de lambiner car en parallèle on doit effectuer le remplissage du tender en charbon. Tout en enfournant les bûches je jette de fréquents coups d’œil au manomètre de pression et je suis un peu déçu de ne pas voir l’aiguille décoller. Bernard me précise que chauffer 1000 litres d’eau prend déjà du temps avant même de monter en pression. Un léger chuintement commence à se faire entendre, la chaudière chante. Pendant une pause j’examine en détail la cabine, c’est beaucoup plus complexe que je ne l’avais imaginé. J’en profite pour m’imprégner de l’atmosphère, je tiens à engranger un maximum de souvenirs de cette expérience inédite, comme les bruits et les odeurs, celles du bois et du charbon, du métal surchauffé, de l’huile et de la graisse, de la vapeur...
 Autour les membres de l’association sont aussi au travail : entretien, réparation, mais aussi ballet de locotracteurs sur le pont tournant pour composer le train que l’on va tracter l’après-midi. Pour ce premier jour ce sera une rame de marchandise. 11 h c’est le moment du cours magistral assuré par Fred tandis que nos instructeurs prennent le relais pour poursuivre la mise en chauffe. Après un exposé sur l’histoire du chemin de fer, une présentation détaillée des différents types de voie, la saga de l’association et la biographie complète de la locomotive, on aborde son fonctionnement, simple dans son principe, ingénieux et compliqué dans sa conception (Je mettrais un certain temps à assimiler l’inversion de vapeur dans les tiroirs). Le repas est l’occasion de faire plus ample connaissance et sitôt le café avalé on retourne préparer la machine. Marc et Bernard nous expliquent à chacun notre rôle et les différentes commandes que nous aurons à manipuler. Pour le chauffeur ce sera le frein de la loco, le gestion des purgeurs, le réapprovisionnement en eau et en charbon lorsque nous serons en ligne. Je me dis que je vais pouvoir m’en tirer et que l’après-midi sera tranquille. Grossière erreur !
14 h le grand moment est arrivé, nous allons conduire une locomotive à vapeur ! Marc effectue les manœuvres pour accrocher les wagons, cette étape nécessite des compétences que seules des années de pratique permettent d’acquérir. Après le passage sur le cendrier pour se débarrasser des cendres il nous donne la main ! Première surprise : il n’y a pas de temps mort. Le circuit est technique avec une succession de montées, de descentes, de courbes, de passages à niveau, sans compter les manœuvres. Les ordres du mécanicien se succèdent : « Frein desserré » « Purgeurs fermés ». Pour ces deux tâches, je m’en sors bien, par contre pour l’eau c’est une autre paire de manches ! J’ai bien assimilé le principe de l’injecteur mais lorsque je passe à la pratique, impossible de trouver le point d’équilibre de la vanne d’alimentation. Sans Bernard j’aurai vidangé toute la réserve d’eau sur la voie, lui en deux ou trois manipulations réussit le remplissage de la chaudière, c’est un métier ! L’après-midi se poursuit en enchaînant les tours et en répétant les gestes qui peu à peu deviennent plus automatiques et fluides.

 17 h 30, retour au dépôt où il faut vider le foyer sur le cendrier avant que Marc assure les manœuvres pour décrocher les wagons et remiser la loco. Premières impressions : intense, physique et prenant, tout ce que j’espérais, tout ce que je suis venu chercher à Rillé ! Débrief autour d’une bière ou d’un soda, le temps s’écoule, on n’a pas envie de partir...

Dimanche 9 h 30 : Inversion des rôles, aujourd’hui je suis mécanicien et on va tracter un train de voyageurs avec des passagers ! Première étape de la préparation : dégraissage de tout l’embiellage avec un pinceau imbibé de gazoil. Peu habile j’en mets autant sur ma combinaison que sur les pièces à nettoyer. Une fois l’ensemble propre il faut procéder au graissage avec 3 lubrifiants différents : huile à haute densité, huile classique, graisse. Heureusement Marc est là pour m’éviter de tout mélanger, il ne se contente pas de m’indiquer quel produit utiliser, il me précise également pourquoi on privilégie celui-ci plutôt qu’un autre. Cette opération permet de découvrir en détail l’embiellage et les dispositifs astucieux qui assurent la lubrification, comme ces graisseurs, cylindres creux qu’on visse petit à petit au fil des voyages pour comprimer la graisse et l’envoyer dans les axes. Après le cours magistral, le repas et le café, nous voici à nouveau prêt à partir. Sentiment partagé entre excitation de prendre les commandes et angoisse à l’idée de véhiculer du public. Marc m’explique les différences avec le train de la veille. Le poids tout d’abord : on passe de 22 tonnes à 33 ! Le frein des wagons ensuite, qui fonctionne « à l’envers », à savoir que lorsqu’il n’y a aucune pression les mâchoires sont serrées, un dispositif étudié pour plus de sécurité. Cette commande que nous n’avions pas samedi vient donc se rajouter à celles du régulateur et du levier de marche que j’aurai à manipuler sans oublier un manomètre supplémentaire à surveiller.
14 h il faut y aller, le levier du régulateur est dur et j’ai du mal à doser la pression, le premier démarrage est un peu brusque mais ensuite ça va mieux. C’est impressionnant comme on sent les réactions de la machine. On arrive en vue de la gare en poussant les wagons, des gens attendent sur le quai, petit coup de stress. Avant le départ, on effectue un retournement de la loco sur le triangle ainsi qu’une purge générale dans un fracas d’enfer. Marc effectue l’accrochage puis se place en arrière. C’est parti !
Photos: Jean-Luc Fievet
Comme la veille pas un moment de répit, les consignes fusent : « régulateur à zéro », « contrevapeur », « freins convoi à 3 bars », « pression à 4 », « marche avant », « coup de sifflet », « lâcher les freins » « tractionne un peu plus ». Je n’ai vraiment pas le temps de m‘inquiéter pour les passagers, les voyages se succèdent. Quelques passages sont plus délicats comme quand on doit faire de l’eau au dépôt. On s’arrête en montée et le redémarrage demande une attention particulière, il faut monter en pression et lâcher les freins puis doser afin de ne ni patiner, ni perdre la puissance. Peu à peu je prends confiance, « joueur » Marc me fixe de petits défis du type « Tu t ‘arrêtes au panneau et tu me maintiens la loco immobile, attention on est en montée ! ». Ce que j’apprécie c’est que les consignes sont toujours assorties d’explications détaillées, on ne se contente pas d’exécuter des ordres on apprend aussi pourquoi on fait telle ou telle action. Cela permet d’anticiper et de prévoir quelle commande exécuter même si on est encore très loin de l’autonomie. 17 h 30 déjà, retour au dépôt, fatigué mais comblé. Comme la veille pas pressé de quitter le site, il faut dire que l’ambiance est conviviale.
  Lundi 9 h 30 : Pour cette dernière journée, ce sera une répétition des précédentes où nous allons occuper tour à tour les deux postes. Aucune lassitude à accomplir à nouveau les mêmes tâches, au contraire on s’active en sachant que le rêve touche à sa fin mais qu’il a été bien réel et qu’il faut en profiter. Par contre j’ai bien saisi que pour moi ça avait été un jeu. Seulement en effectuant toutes les tâches on mesure quelle devait être la pénibilité pour les équipages qui faisaient ça tous les jours par tous les temps toute leur vie.
 Les jours suivants le stage : Attention aux effets secondaires, surtout lors de la conduite d’une automobile. Sont fréquents, les coups d’œil sur le compte-tours en désespérant de ne pas dépasser 3 bars de pression, les ordres aboyés à son épouse : « Frein serré, purgeurs ouverts ». Par contre une vigilance maximale est nécessaire pour proscrire à tout prix la contre-vapeur, l’embrayage n’aime pas ça, mais alors pas du tout... Remerciements à l’ensemble des membres de l’AECFM pour leur patience, leur bienveillance, leur indulgence et leur professionnalisme, on n’est pas près d’oublier ces moments passés en leur compagnie. Le stage était à la hauteur de mes espérances, organisé avec sérieux et rigueur tout en nous permettant d’y être véritablement acteur et de prendre un réel plaisir.

Jean-Luc, stagiaire 2019


Un tel témoignage est une belle récompense pour tous ceux qui préparent et réalisent ces stages, merci !

Vous pouvez vous aussi vivre cette expérience. L'Aecfm propose différentes formules sur des durées de 1, 3 ou 5 jours. Toutes les infos sur: https://aecfm.fr/stageVapeur.html

Ode to steam training

The Rillé railway is renkoms for its steam locomotive driving training sessions. Here is the testimony of what a trainee experienced over 3 days.


A satiated trainee's log

Saturday 9am, I am in view of the roundhouse, visible from the road. Tension rises a bit, the training is said to be physical and due to my size, it is not the domain where I am the best but it is a childhood dream to be able to ride a steam locomotive and when I heard it was possible with the AECFM, nothing in the world could stop me.
Friendly welcome with a good coffee, introduction, visit of the site and without delay we get to the heart of the subject. As we are only two trainees, the roles distribution is quickly done, for this first day, Jean-Marc will be driver and I will be fireman, each one of us being chaperoned by a skilled instructor.
Bernard tells me the role of the fireman and the first tasks to accomplish. Armed with buckets, a brush and a trowel, I undertake the cleanining of the fireplace and the somkebox. For this time, I am exempt from sweeping the boiler tubes.

No dead time, once everything is dust free, the fire must be lit and regularly fed with wood at first. After two or three smoking out on opening the firebox door, I end up  understanding the draught operation. No question of wandering because in parallel, we have to proceed to fillling the tender with coal. While stuffing logs I frequently have a glimpse on the pressure gauge and I am a little disappointed not to see the needle to take off. Bernard explains that heating up 1000 liters of water takes time before event rising pressure. A slight hissing sound begins to be heard, the boiler sings. During a pause I closely look at the cabin, it is way more complex than I imagined. I take the opportunity to immerse myself in this atmosphere, I want to sstore a maximum of memories of this unique experience, as the noises and the smells, those of the wood and coal, of the overheated metal, of oil and grease, of the steam...
All around, the association members are at work too: upkeep, repair, but alos a ballet of engines on the turntable to form the train we will tow this afternoon. For this first day, it will be a merchandise train.
11am, it is the moment for the lecture by Fred while our instructors take over to continue the heating. After a presentation on the history of railway, a detailed introduction to differents types of track, the saga of the association and the complete biography of the locomotive, we review its operation, simple in its principle, ingenious and complicated in its design (I will take some time to assimilate the steam reversing within the drawers). Lunch is the occasion to get to know each other better and as soon we drank our coffee, we resume the preparation of the machine. Marc and Bernard explain us our respective role and the different controls we will have to handle. For the fireman, it will be the locomotive brake, bleeders management, supply in water and coal while en route. I think I will cope and the afternoon will be easy.
Big mistake !
2 pm, this is the moment, we are just about to drive a steam locomotive ! Marc carries out the manoeuvres to hook-up the wagons, this step requires skills only years of practice allow to get. After a passage over the ashtray to get rid of the ashes, he gives us the controls ! First surprise : there is no dead time. The circuit is technical with a succession of cilmbs, descents, curves, level crossings, without counting the manoeuvres.  The driver's orders are flowing: "brake released", "bleeders closed". For these two tasks, I am dealing well, on the other hand, feeding the water is an other story. I well understood the injector principle, but when going practical, impossible to find the balance point of the valve. Without Bernard I would have drained the whole reserve over the track, he did success in two or three tries to fill the boiler, it is an art ! The afternoon goes on, chaining the circuits and repeating the gestures that gradually become more automatic and fluid.

 5:30pm, Back at the depot where the firebox must me emptied over the ashtray before Marc will do the manoeuvres to release the wagons and park the loco. First impressions:  intense, physial and taking, all I expected, all came to get at Rillé ! Debrief around a beer or a soda, time passes by, we do not want to leave...

Sunday 9:30am : Inversion of the roles, today I am driver and we will tow a passenger train! First step of the preparation: degreasing the linkage with a brush soaked with gas-oil. somewhat clumsy, I spill as much on my suit than on the parts to be cleaned. Once the whole is clean, greasing must be done with 3 different lubricants: high density oil, classic oil and grease. Fortunately, Marc is there to prevent me from mixing everything, he does not only indicate me what product to use, he also tell me why one is prefered to an other. This operation allows me to discover the linkage in detail and the astute devices doing the lubrication, as the greasers, hollow cylinders we tighten slightly during stops to compress the grease and send it to the axles. After the lecture, the lunch and the coffee, we are ready to go again. Split sentiment between excitement to take controls and anxiety to the idea to carry passengers. Marc explains the differences with the train of the day before. Firstly the weight: we go from 22 to 33 tons ! The carriages brake then, it works "reversed", read that they are tighten when there is no pressure, a system designed for more safety. This control we did not have on saturday adds up to the regulator and the drive lever I will have to handle, not to mention an additional pressure gauge to watch.
2 pm We must go, le regulator lever is hard to move and I have trouble dosing the pressure, the first start is quite abrupt but then it is better. It is impressive how we feel the reactions of the machine. We arrive in view of the station pushing the carriages, peoples are waiting on the platform, some little stress. Prior to departure, we perform a turnaround of the loco on the triangle as well as a general bleeding in a noise from hell. Marc does the connection and places himself behind. Here we go !

Photos: Jean-Luc Fievet
As the day before not a moment of rest, orders fuse: "regulator at zero", "countersteam", "convoy brake at 3 bars", "pressure at 4", "march ahead", "whistle", "brakes off", "get more traction". I don't really have time to worry for the passengers, turns succed one another. Some places are more delicate as when we have to get water at the depot. We stop in a climb ant the restart requires a particular attention, it is necessary to rise the pressure and release the brakes then dose for not to slip nor lose power. Gradually I get confidence, kinda player, Marc sets me challenges like "you stop at the sign and maintain the loco motionless, beware we are in a climb !"  What I like is that the instructions are always assorted by detailed explanations, we do not just execute orders, we learn too why we do this or that action. It allows to anticipate and forsee what command to execute even if we are very far from autonomy. 5:30pm already, back to the depot, tired but satiated. As the day before, not in a hurry to leave the site, force is to say that the ambiance is friendly.
  Monday, 9:30 am : For this last day, it will be a repetition of the previous ones where we will alternatively man the two stations. No lassitude to accomplish the same tasks again, on the contrary we activate knowing the dream is about to end but it is real and we must enjoy it.  But I well understood that it was a game for me. While doing all the tasks we measure the hardness for the teams that worked so every day, by any weather, all their life.
The days after the training,: beware to secondary effects, mostly during car driving. Frequently observed are glimpses on the tachometer in despair not to reach 3 bars of pressure, the orders barked to the spouse: "brakes on, bleeders open".  On the contrary, a maximum vigilance is required to avoid counter-steam, the clutch gear doesn't like it at all...  Thanks to the whole members of the AECFM for their patience, their forgiveness and their professionalism, we are not ready to forget those times we spent in their company. The training met my expectations, organized with seriousness and rigor while allowing us to be truly actors and taking real pleasure from it.

Jean-Luc, trainee 2019


Such a testimony is a nice award for all those who prepare and handle these training sessions, thanks !

You too can live this experience. The Aecfm society offers different formulas of 1, 3 or 5 days duration. All the infos 'in french) on : https://aecfm.fr/stageVapeur.html